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Return to Equinoxes, Issue 11: Printemps/Été 2008
Article ©2008, Yuri Kondratiev, Brown University

YURI KONDRATIEV, Brown University

L'ARCHITECTURE CHEZ CLAUDE NICOLAS LEDOUX ET FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND : ENTRE LA RHÉTORIQUE DU POUVOIR ET LA POÉTIQUE DE L'ESPACE ARCHITECTURAL


L’Architecture est un type de rhétorique du pouvoir
-Nietzsche

L’Architecture est à la maçonnerie
Ce que la poésie est aux belles lettres
-Ledoux

L’Architecture considérée sous le rapport de l’art, des mœurs et de la législation de Claude Nicolas Ledoux esquisse la complexité de l’entrecroisement des aspects poétiques et politiques de l’oeuvre architecturale. Ledoux conçoit d’une part son travail comme un reflet et un soutient de l’ordre sociopolitique établi.1 Il insiste sur l’importance du service que rend l’architecte à la société car « le caractère de monuments, comme leur nature, sert à la propagation et à l’épuration des mœurs » (3). Dans son livre, Ledoux réunit une multiplicité des bâtiments en les classant selon leur usage et les conditions de leurs habitants – la maison du pauvre, la maison d’un homme de lettres, la maison du directeur et les maisons de la surveillance qui tous reflètent d’une façon ou d’une autre l’ordre sociopolitique qui s’expriment à travers le décor, la grandeur, et l’usage particulier de ces structures. Chez Ledoux « tous les arts, toutes conditions trouvent des demeures qui leur sont propres » (3). Or, la correspondance entre la forme et l’usage, entre le décor et les effets de l’architecture peut faire partie des stratégies du pouvoir qui s’exerce sur le sujet à travers le maniement minutieux de formes architecturales. Néanmoins, il serait réducteur de concevoir le rapport entre l’architecture et le sujet uniquement dans les termes du contrôle sensuel et panoptique qu’exercent certaines formes d’architecture. D’ailleurs, on doit examiner l’architecture non seulement dans les termes de son utilité pour l’ordre établit, mais aussi comme un acte contemplatif et imaginatif qui peut créer et transformer l’espace architectural ainsi que la configuration des rapports entre le sujet et l’architecture.

Le livre de Ledoux réunit les desseins, les principes d’art, les techniques de création, et des commentaires sur l’utilité, et la beauté esthétique de ces objets, en nous démontrant des liens importants entre les arts et les mœurs, entre l’architecture et la société, entre les domaines politiques et idéologiques, poétiques et esthétiques de l’architecture. La description de certaines constructions témoigne du désir de Ledoux de créer l’architecture qui réglerait les mœurs et rendrait service à l’ordre de l’époque. Notamment, on peut discerner des éléments du panoptisme,2 dans la saline royale d’Arc-et-Senans, où Ledoux prévoit une rigide structuration des formes architecturales et de leurs fonctions afin de régler les mouvements et les fonctions des corps des travailleurs. En outre, dans sa Préface il démontre comment des éléments décoratifs de certains bâtiments exercent leur pouvoir sur le sujet à travers les effets sensuels maîtrisables ; Il nous révèle aussi que la décoration « modifie les irrégularités du sort, abaisse la présomptueuse opulence ; et relève la timide infortune ; elle flétrit ignorance, agrandit le savoir, et dans sa juste répartition, donne aux nations le lustre qui les fait briller » (11). Ledoux évoque la beauté dans les termes de la puissance et du contrôle sur le spectateur : « Qui n’as pas éprouvé le despotisme de la beauté ? Cette sympathie subite et irréfléchie qui commande l’admiration et soumet nos sens à son empire » (9). Ce qui est remarquable dans la citation ci-dessus, c’est l’effort de poétiser l’influence du caractère architectural en la personnifiant et en comparant ses effets au despotisme qu’on associe normalement avec un type de gouvernement. Il passe ainsi à la rhétorique du pouvoir en nous démontrant les effets bénéfiques de l’art sur le sujet qui se soumet à l’ordre à travers la contemplation des objets artistiques.

D’ailleurs, la conception de l’ordre idéal que Ledoux évoque toujours dans les termes poétiques nous aide à saisir la tension essentielle entre la rhétorique du pouvoir et la poétique de l’espace qui est au cœur de son œuvre :  

Avant que la nuit ne couvre de son voile obscur le vaste champ où j’ai placé tous les genres d’édifices que réclame l’ordre social, on verra des usines importantes, filles et mères de l’industrie, donner naissance à des réunions populeuses. Une ville s’élèvera pour les enceindre et les couronner. Le luxe vivifiant, ami nourricier des arts, y montrera tous les monuments que l’opulence aura fait éclore. (2)

L’architecte décrit la création de sa ville idéale en tissant des métaphores provenant de la nature avec celles de l’ordre social. Les édifices, les usines, et la ville acquièrent les fonctions organiques en donnant naissance aux « réunions populeuses ». L’expression, le « luxe vivifiant, ami nourricier des arts, »3 est aussi liée métaphoriquement aux fonctions organiques de nourricerie qu’on attribue normalement à la terre et à la mère. On se rend compte aussi que Ledoux semble passer à la rhétorique du pouvoir en justifiant l’ordre social qui est propre à la société de son époque. Dans l’usage de la métaphore, il s’agit surtout de l’effort de présenter la culture, l’ordre sociopolitique comme l’ordre naturel et ainsi éternel, durable, et idéal. On doit aussi noter que la métaphore selon Ricœur peut faire partie de ces deux domaines – de la rhétorique et de la poétique.4 Cette scène de la création met en relief l’espace architectural à travers les indices sur le temps et le paysage : « avant que la nuit ne couvre de son voile obscur le vaste champ » qui rend éternel d’une part le moment de la création, mais d’autre part elle pourrait provoquer une rêverie qui risque de se détacher du reste de la phrase et de la rhétorique du pouvoir parce qu’il s’agit de la métaphore vive, des images poétiques qui pourraient retrouver leur autonomie dans l’intensité de leur force sensible.5

En outre, Ledoux suggère que la création artistique consiste non seulement en des formes architecturales précises, mais aussi en des pensées informes qui font partie essentielle de l’acte créatif : « C’est l’enthousiasme dramatique du métier » qui compte et « on ne peut en parler qu’avec exaltation. Si le dessein donne la forme, c’est elle qui répand le charme qui anime toutes les productions. Comme il n’y a pas d’uniformité dans la pensée, il ne peut y avoir dans l’expression » (14). On note que Ledoux n’évoque pas l’influence du caractère architectural en termes du contrôle du corps et de l’imposition de la loi, comme le constate Foucault dans Surveiller et Punir, mais plutôt en termes de morale,de vertu, et de beauté, qui sont entrecoupés incessamment par des élans poétiques du créateur qui s’extasie devant les images de sa création. L’Architecte se retrouve en fait devant les possibilités illimitées dans le travail sur la forme architecturale, ce qui lui permet de transformer l’espace à son gré au lieu de s’y soumettre passivement. En concevant son œuvre, l’architecte rivalise même avec l’omnipotence de Dieu :

Si le peintre présente l’homme sous toutes les faces, l’Architecte n’a-t-il pas un pouvoir colossal ? Il peut, dans la nature, dont il est l’émule, former une autre nature ; il n’est pas borné à cette partie de terrain trop étroite pour la grandeur de sa pensée ; l’étendue des cieux, la terre est son domaine ; il assemble les merveilles immenses pour la couvrir ; il crée, il perfectionne et met en mouvement ; il peut assujettir le monde entier aux désirs de la nouveauté qui provoque les hasards sublimes de l’imagination. (25)

En fait, le cogito de l’architecte6 peut assumer le regard de Dieu, et assujettir l’univers à ces désirs au lieu d’être assujetti à l’ordre établi. La subjectivité particulière du créateur est liée surtout à l’espace de sa création ; au lieu d’être le sujet de la loi il semble devenir le sujet de sa propre imagination. Apres tout, l’oeil panoptique qui figure dans la construction d’Arc-et-Senans et réapparaît dans la conception du théâtre de Besançon pourrait être lu comme une manifestation du regard de l’architecte. En plus, la maison du pauvre doit être vue non seulement comme preuve des conditions sociales disparates, mais aussi sous optique du rapport instable entre le sujet et l’espace architectural.7 En effet, le cogito du créateur est capable de transformer la demeure du pauvre dans un espace cosmique et idyllique :

Eh bien, ce vaste univers qui vous étonne, c’est la maison du pauvre, c’est la maison du riche que l’on a dépouillé ; il a la voûte azurée pour dôme, et communique avec l’assemblée des dieux. Enfant du même père, il est héritier du même patrimoine ; L’architecte du riche est le sien. Voyez ce que la nature a fait pour le pauvre. Les rois, les empereurs, les dieux eux-mêmes ont-ils des palais plus grands ? (155)  

Apres tout, dans le contexte de notre analyse, ce sont les images liées à l’espace architectural qui donnent aux créateurs leur propre cosmos,8 voire l’espace mental qui reflète leur subjectivité et leur sensibilité particulière. Le travail sur les éléments architecturaux chez Ledoux et chez Chateaubriand fait partie de l’expression de leurs sensibilités et de leurs visions poétiques. L’espace architectural dans René de Chateaubriand est lié aussi à l’intensité sentimentale des images, des souvenirs et des sensations qui côtoient ses lieux de mémoire, parmi lesquelles sont le château et la tombe de son père, les monastères, les voûtes et les cloches des églises, et les ruines des monuments. L’architecture semble révéler la profondeur de son âme et rassembler ses rêveries poétiques. C’est à travers ses rapports avec l’architecture qu’on découvre la subjectivité de René liée à son propre espace.

Le regard du romancier crée et transforme la réalité à travers les signes architecturaux dont la profondeur et la signification s’amplifient et se compliquent à travers leurs combinaisons avec des éléments de la nature, du paysage, du temps et de la toponymie. Ainsi, la description du village de Natchez « avec son bocage de mûriers, et ses cabanes qui ressemblent à des ruches d’abeilles » nous donne un sentiment idyllique et en même temps exotisant de la vie et de la localité des sauvages (142).

Mais en effet, le lien entre le calme et la tranquillité qu’esquisse le paysage autour du protagoniste ne produit pas l’effet bénéfique sur l’âme de René lorsqu’il est assis « sur le gazon, au pied de l’arbre » en contemplant le coucher de soleil. Comme le révèle René lui-même, « La paix de vos cœurs, respectables vieillards, le calme de la nature autour de moi, me font rougir du trouble et de l’agitation de mon âme » (143). Mais, afin de saisir le lien entre l’espace architectural et la subjectivité du romancier, il faut le considérer à plusieurs niveaux textuels. La mélancolie et l’inconstance de René sont liées à l’architecture de plusieurs lieux qu’il parcourt dans le temps et l’espace – tantôt les temples d’Italie, tantôt les rêveries sur la bouche du volcan Etna en Sicile, tantôt la tombe de son père où « la terre se renferme sur sa dépouille. » En effet, René bâtit son espace mental comme celui de la solitude et celui de l’inconstance en passant d’un objet architectural à l’autre.              

C’est peut-être l’image de la tombe qui est la plus récurrente et la plus évocatrice vis-à-vis de la structure du roman et de l’architecture mentale du romancier. Il y a plusieurs tombes et plusieurs formes de tombes dont les effets varient selon les éléments textuels liés au temps, au placement, à la perspective, et aux liens imprévisibles entre la nature et l’architecture. En effet, Chateaubriand doit travailler sur l’architecture de son espace poétique en aménageant les effets de certains lieux de solitude.

Les sentiments liés à la mort de son père amènent à la contemplation profonde sur la mort, l’univers et l’éternité comme si la tombe de son père cachait en soi-même quelque mystère et devenait « l’indice de notre immortalité » (146). Ensuite, l’évocation des « voûtes du château gothique » est tissée avec le son de la cloche et le chant des prêtres afin d’amplifier les sentiments de la douleur, et de l’accablement ressentis par René et sa soeur Amélie.

Un autre tombeau symbolique qu’on retrouve dans René est lié à la lettre où Amélie raconte sa décision de se retirer dans le couvent:

Je pars pour le couvent de… Ce monastère, bâti au bord de la mer, convient à la situation de mon âme. La nuit, du fond de ma cellule j’entendrai le murmure des flots qui baignent les murs du couvent ; je songerai à ces promenades que je faisais avec vous, au milieu des bois… (166)

On note que la construction de ce monastère implique surtout un travail mental sur les souvenirs et les images qui remplissent et ajoutent de la profondeur à cette forme d’architecture. Ce passage exemplifie la souplesse de l’image architecturale dont les éléments sont imprévisibles et dont les effets semblent être guidés par les états d’âme des personnages. La créativité dans le travail sur l’image du monastère est nourrie aussi par le paysage qui l’entoure – la mère, la nuit, les bois et les murmures qui expriment d’une part la solitude, mais d’autre part esquissent une possibilité de bâtir un autre espace, celui de ses rêves et de ses souvenirs à l’intérieur du couvent. Mais, aussitôt cette image du monastère va se transformer en sanctuaire, ou dans une sorte de tombeau qui garderait leurs souvenirs et leurs désirs secrets : « Ah ! Si un même tombeau nous réunissait un jour ! » ; « Mais non : je dois dormir seule sous les marbres glacés de ce sanctuaire où reposent pour jamais ces filles qui n’ont point aimé » (167). Ainsi, la souplesse sentimentale de l’architecture convient aux changements spontanés de l’état d’âme et aux nuances des émotions.  

Lorsque René nous raconte ses retours au château paternel, « situé au milieu des forêts, près d’un lac, dans une province reculée », il évoque déjà en certaine mesure son goût pour la solitude. Mais, ce sont les descriptions de ses promenades autour du château qui le plongent dans la rêverie et la contemplation profonde des images. Il reconstruit à travers le son de la cloche lointaine, une image du temple qui appelle les hommes des champs : « Tout se trouve dans les rêveries enchantées où nous plonge le bruit de la cloche natale : religion, famille, patrie, et le berceau et la tombe, et le passé et l’avenir » (145). Chateaubriand passe ainsi du travail sur son propre espace mental vers un travail sur la conscience collective. Autrement dit, le romancier est capable d’élaborer à travers son propre rapport avec l’architecture une configuration idéologique qui s’appliquerait au rapport entre le sujet collectif et l’architecture de son patrimoine. Ses souvenirs autour du château paternel et des images qui réunissent « sa délectable mélancolie » au bruit des cloches de son lieu natal se transforment dans une identité collective qui mettrait un individu dans le contexte de la religion, de l’idéologie de la famille, et de sa patrie.9

De plus, pendant ses voyages en Italie, René considère en même temps les liens entre l’architecture, la religion, et les arts qu’il retrace à travers les effets sensibles qu’exercent ces monuments sur le spectateur :

Avec quelle sainte et poétique horreur j’errai dans ces vastes édifices consacrés par les arts à la religion. Quel labyrinthe de colonnes ! Quelle succession d’arches et de voûtes ! Qu’ils sont beaux ces bruits qu’on entend autour des dômes, semblables aux rumeurs des flots dans l’Océan, aux murmures des vents dans les forets, ou à la voix de Dieu dans son temple ! L’architecte bâtit, pour ainsi dire, les idées du poète et les fait toucher aux sens. (151)

Dans la citation ci-dessus, l’art semble se mettre au service de la religion. René poétise, intensifie, et met en relief la force qu’exerce l’architecture sur les sens à travers ses liens avec la poésie et la nature.

Pour conclure, l’œuvre architecturale peut être vue comme une création poétique et politique. L’architecture participe notamment à l’imposition et à la dissémination du pouvoir et de l’idéologie de l’ordre établi. Pourtant, chez Ledoux il ne s’agit pas tout simplement du panoptisme et du sensualisme dans les deux configurations principales dans les rapports entre le sujet et l’espace.  La question qui resurgit grâce à la dichotomie entre la poétique et la rhétorique du pouvoir, c’est la question de la possibilité de la liberté du sujet. Chez Ledoux la création des formes architecturales doit passer par des images et des élans poétiques du créateur dont l’expérience subjective est liée surtout à l’espace de la création plutôt qu’à la soumission passive à la loi et à l’ordre établi. D’autre part, lorsqu’un poète transforme la réalité à travers l’espace architectural, le produit de l’imagination peut ensuite servir aux constructions de nouvelles formes de la pensée, ou être re-incorporé dans les configurations idéologiques qui s’inscrivent dans la rhétorique du pouvoir. En fait, en examinant le texte de René, on comprend que le personnage principal travaille sur un projet de création poétique à travers l’activité de rêverie en bâtissant son espace architectural dans les déserts de Louisiane. Mais, on peut placer son projet aussi dans le contexte de l’esthétique des monuments et de la revalorisation de la religion chrétienne.10 Néanmoins, ce sont surtout les moments des élans romantiques et poétiques qui donnent au sujet la capacité de transformer la réalité. Ce que Ledoux et Chateaubriand partagent en mêlant les aspects de la nature, du paysage, des rêves, et des images dans leurs créations architecturales, correspond surtout à la poétique de l’espace chez Gaston Bachelard.11 L’architecture considérée sous optique d’entrecroisement entre la rhétorique du pouvoir et la poétique nous a donné aussi l’accès à la subjectivité particulière du créateur qui retrace, re-imagine, et transforme l’espace architectural dans l’acte créatif. 

 


Yuri Kondratiev est étudiant dans le programme de doctorat du Département d’Etudes françaises à l’Université Brown. Il a obtenu sa maîtrise en littérature française à l’Université Tulane en Louisiane en 2005. Il se spécialise en littérature du 16ème siècle. Il s’intéresse aussi à la théorie littéraire et à la littérature du 18ème et du 20ème.


 

NOTES


1 Selon Elias, le rôle de l’architecture est bien déterminé par l’ordre sociopolitique à l’époque donnée. Au 18e, le rang et le prestige social de l’habitant s’expriment par le décor de sa demeure. Ainsi, le décor architectural sert à imposer et à soutenir la hiérarchie sociale. Comme le démontre Norbert Elias dans La Société de cour. Paris : Flammarion, 1985, la société de cour s’appuie sur la nécessité de montrer le rang et la splendeur dans leurs demeures qui correspondent strictement à leurs rangs et à leurs positions sociales.

2 En effet, Michel Foucault s’inspire en partie du travail de Ledoux en rédigeant son Surveiller et punir. Editions Gallimard, 1975.Un œil panoptique apparaît notamment sur le bâtiment du surveillant dans la saline royale d’Arc-et-Senans. Mais, dans notre analyse le regard du créateur ne se réduit pas à l’oeil panoptique foucaldien.

3 D’ailleurs, dans la culture de son époque, le rôle du luxe est clé dans la construction et l’imposition de la hiérarchie sociale qui caractérise la société de cour selon Norbert Elias. La Société de cour. Paris : Flammarion, 1985

4 Voir Paul Ricœur La métaphore vive. Paris : Seuil, 1975, surtout « Entre rhétorique et poétique : Aristote »  p.13-60. 

5 Jacques Derrida dans « La mythologie blanche : la métaphore dans le discours philosophique ». Marges de la Philosophie. Minuit, 1972 suggère que la métaphore garde toujours le potentiel de rester double – d’une part, comme une démonstration la plus rapide possible de certaines idées, d’autre part comme la preuve de l’ambiguïté, de l’inconscient, de la pensée non-pensante. Le danger pour la connaissance objective se présente sous la forme des métaphores immédiates qui peuvent se développer comme une pensée autonome et se compléter dans « le règne de l’image » (Derrida 309). Certes, toute création consiste à la fois aux formes précises et aux pensées informes. De même, Jacques Rancière parle dans L’Inconscient esthétique du pathos dans le logos, de la pensée dans la non-pensée p.28. Paris : Editions Galilée, 2001

6 Bachelard note que la pensée a tendance à devenir très agile et mobile lorsqu’elle rencontre des éléments naturels (xxiv).On Poetic Imagination and Reverie. Selections from Gaston Bachelard / transl., with a preface and an introduction by Colette Gaudin.New York: Bobbs-Merrill Company, 1971

7 Bachelard décrit la poésie en tant qu’activité démiurgique, et préfère, selon Gaudin, laisser ouverte la question suivante : « Quand le rêveur parle, qui parle, lui ou le monde ? » (xxv).

8 Dans « Cogito du Rêveur », Bachelard révèle que « reverie assumes the whole universe in its images; simultaneously creative and natural, its value is indissolubly aesthetic and ontological » (XVII) et de meme, « reverie gives us a cosmos » (xvii). On Poetic Imagination and Reverie. Selections from Gaston Bachelard / transl., with a preface and an introduction by Colette Gaudin.New York: Bobbs-Merrill Company, 1971

9 Roland Barthes dans Mythologies. Paris : Editions du Seuil, 1970 explique le rôle idéologique des monuments selon leur traitement dans le Guide Bleu et en suivant sa logique on comprend qu’il s’agit dans les guides touristiques de la fabrication linguistique/mythologique qui rend service à l’idéologie bourgeoise. En fait, Barthes retrace la naissance de l’idéologie bourgeoise et de ces mythes justement au18ème siècle. Il parle du lyrisme de l’éternel et de la nature qui présente l’ordre et l’idéologie comme nature tandis qu’il s’agit plutôt d’un artifice/d’une fabrication linguistique.

10 René, inséré dans le Génie du Christianisme peut être lu comme un type particulier d’apologétique de la religion chrétienne que Béatrice Didier appelle « l’apologétique par l’esthétique » légitimant les dogmes et les cérémonies du catholicisme. En outre, son œuvre s’inscrit dans le contexte des débats politiques et philosophiques sur le rôle de la religion dans le fonctionnement social. Chateaubriand. Thèmes et Etudes. Paris : Ellipses, 1999

11 Voir Gaston Bachelard. La Poétique de l’espace. Paris : Presses Universitaires de France, 1967 et Gaston Bachelard. On Poetic Imagination and Reverie. Selections from Gaston Bachelard / transl., with a preface and an introduction by Colette Gaudin.New York: Bobbs-Merrill Company, 1971

 


BIBLIOGRAPHIE

Bachelard, Gaston. La Poétique de l’espace. Paris : Presses Universitaires de France, 1967

--. On Poetic Imagination and Reverie. Selections from Gaston Bachelard / transl., with a preface and an introduction by Colette Gaudin.New York: Bobbs-Merrill Company, 1971

Barthes, Roland. Mythologies. Paris : Editions du Seuil, 1970

Chateaubriand, François, René. Atala; René. Chronologie et préface par Pierre Reboul. Paris: Garnier-Flammarion, 1964

Derrida, Jacques. « La mythologie blanche : la métaphore dans le discours philosophique ». Marges de la Philosophie. Minuit, 1972

Didier, Béatrice. Chateaubriand. Thèmes et Etudes. Paris : Ellipses, 1999

Elias, Norbert. La Société de cour. Paris : Flammarion, 1985

Foucault, Michel. Surveiller et Punir. Editions Gallimard, 1975

Ledoux, Claude Nicolas. L’architecture considérée sous le rapport de l’art, des mœurs et de la législation. Paris: Hermann, 1997

Rancière, Jacques. L’Inconscient esthétique. Paris : Editions Galilée, 2001

Ricœur, Paul. La métaphore vive. Paris : Seuil, 1975